La Série Surnaturelle 
La vie de William Marrion Branham

La Série Surnaturelle
La vie de William Marrion Branham

Owen Jorgensen

Miracles en noir et blanc

Chapitre 53

1951



WLLIE UPSHAW avait attendu cette soirée pendant 66 ans. «C’est maintenant ou jamais» pensa-t-il anxieusement. «Si je pouvais seulement arriver à temps...» Il aurait voulu que le taxi roule plus vite mais la circulation dense de l’heure de pointe imposait au chauffeur une conduite plus lente. Willie jeta un coup d’œil à sa montre. La réunion de William Branham allait commencer d’un moment à l’autre. S’il n’arrivait pas à temps pour obtenir une carte de prière, ce voyage se révèlerait peut-être vain! Sans carte de prière, il ne pourrait pas aller dans la ligne de prière ; et s’il n’allait pas dans la ligne de prière, comment pourrait-il jamais réaliser son rêve?

Pendant plus d’un demi-siècle, il avait entretenu un rêve fou dans son cœur, la petite braise ardente d’un désir qu’il refusait de laisser se consumer. Willie Upshaw voulait marcher sans aide. C’était aussi simple que ça. Et aussi compliqué. La dernière fois qu’il avait marché seul remontait à ses 18 ans, avant qu’il ne se soit fracturé le dos lors d’un accident de la ferme. Durant toutes les pénibles années qui suivirent, il avait lutté pour vivre à la hauteur de sa devise : «Ne laisse rien te décourager et nabandonne jamais.» Croyant en un Dieu à la puissance illimitée, Willie avait prié avec ferveur pour marcher à nouveau. Dieu l’avait guéri de plusieurs maladies, incluant un cancer inopérable au visage. Malgré ses nombreuses années de prière pour obtenir la foi appropriée, il n’avait toutefois pas réussi à atteindre le niveau de foi nécessaire pour se lever et marcher, jusqu’à maintenant, peut-être...

Le jour précédent, Willie Upshaw et sa femme Lily, assistaient à une convention de ministres baptistes non loin de sa demeure à Santa Monica en Californie. Ils y rencontrèrent le Dr Roy Davis, le ministre qui avait ordonné Bill au ministère en 1932. Willie Upshaw avait demandé au Dr Davis si tous les comptes rendus phénoménaux qu’il avait entendus à propos de William Branham étaient vrais. Roy Davis lui raconta un miracle dont il avait été témoin. Un diacre de son église, Frank Shoemaker, avait perdu l’usage de ses deux jambes lorsqu’il s’était fracturé le dos dix ans auparavant. Confiné à son fauteuil roulant, il se rendait utile en travaillant au bureau de l’église. L’année dernière, Shoemaker avait assisté à une campagne de guérison Branham et, ce soir-là, William Branham avait eu une vision de Frank Shoemaker en train de marcher. Shoemaker se leva immédiatement et s’éloigna de son fauteuil roulant en marchant. Davis lui dit que Frank Shoemaker marchait parfaitement bien depuis ce temps.

Cette histoire attisa la braise du rêve de Willie jusqu’à la rendre rougeoyante et fumante. Si jamais il parvenait à ce que William Branham prie pour lui, peut-être retrouverait-il, lui aussi, l’usage de ses jambes. Puis il apprit que William Branham s’apprêtait à terminer une campagne de guérison à Los Angeles. Soudainement, le vieux rêve de Willie se mit à brûler de nouveau. Il se rendit chez lui, fit ses bagages et réserva un siège sur le prochain vol pour Los Angeles. Ça y était! Ceci était probablement sa dernière chance! Voilà la raison pour laquelle il devait arriver à la réunion Branham assez tôt pour obtenir une carte de prière.

Malheureusement, la densité de la circulation augmentait, ralentissant son taxi davantage. Il se mit à jouer nerveusement avec un des rivets de son corset orthopédique.

«Willie» lui dit sa femme, «garde les yeux fixés sur le Seigneur. Dieu t’a déjà aidé à vaincre de si nombreuses épreuves. Pense à tout l’honneur qui Lui reviendra lorsque tu traverseras le continent, sans béquilles, pour témoigner de Lui en déclarant qu’Il est non seulement le Sauveur de ton âme mais aussi le Grand Médecin qui a guéri ton corps.»

Willie savait qu’elle avait raison, mais il lui semblait qu’une épaisse couverture de doutes essayait toujours d’étouffer sa flamme. Il pensa à quel point cela faisait longtemps qu’il avait marché sans béquilles. Son accident avait eu lieu en 1884. On était maintenant en 1951, soixante-six ans plus tard.

Tant de choses s’étaient produites depuis ce jour fatidique de l’été 1884. Les sept années qu’il avait passées au lit lui avaient semblé tenir du cauchemar. Pourtant, ces années agonisantes l’avaient rapproché de Dieu. Dans son lit de souffrances, il écrivit un livre inspirateur : Willie le déterminé, ou les réflexions d'un reclus. Ce livre démarra sa longue carrière dans la fonction publique. Les ventes de Willie le déterminé lui procurèrent assez d’argent pour faire ses études supérieures. Plus tard, il fonda le Magazine de lÂge d'or dont il fut l’éditeur pendant 13 ans.

Il se lança ensuite en politique. En 1919, il gagna un siège au Congrès des États-Unis, élu par la population de la Géorgie. Willie était particulièrement fier des huit années qu’il avait servies à la Chambre des Représentants des États-Unis. Plusieurs de ses amis l’appelaient encore le Congressiste Upshaw. En 1932, il fit une campagne pour devenir Président des États-Unis à titre de candidat pour le Parti de la Prohibition.

Après sa défaite présidentielle, il travailla bénévolement dans le secteur de l’éducation chrétienne, aidant les enfants désavantagés à se rendre aux études supérieures. Il visita des écoles dans 42 états, donnant des conférences devant des dizaines de milliers d’étudiants, les encourageant à rallier leur raison d’être aux desseins de Dieu. En 1938, à l’âge de 72 ans, il fut ordonné ministre baptiste, puis il remplit deux mandats en qualité de vice-président de la Convention Baptiste du Sud. Il officia même à titre de vice-président du Collège et Séminaire Baptiste Linda Vista à San Diego en Californie.

Maintenant âgé de 84 ans, Willie Upshaw se sentait fier de sa carrière distinguée, tout particulièrement en raison de son handicap. Au cours de toutes ces années difficiles, il n’abandonna jamais son rêve de marcher à nouveau aussi librement que tout autre homme. Il avait toujours cru que s’il réussissait à atteindre le niveau approprié de foi, toutes choses seraient possibles.

Pendant que le chauffeur de taxi tentait de progresser à travers la circulation dense, Willie sortit une coupure de journal de sa poche et la relut pour s’encourager. L’article concernait un miracle qui s’était produit l’année précédente dans la vie de Florence Nightingale Shirlaw, une parente de Florence Nightingale, l’infirmière anglaise renommée du 19e siècle. Florence Shirlaw demeurait en Afrique du Sud. Même si elle n’était que dans la trentaine, sa vie était étouffée par un cancer malin de la portion stomacale du duodénum, ce qui l’empêchait de digérer sa nourriture. Comme le cancer était inopérable, sa condition semblait sans espoir. Son médecin l’avait nourrie par intraveineuse pendant plusieurs mois pendant que ses muscles se desséchaient et que sa peau se flétrissait à tel point qu’elle adhérait à ses os. Son poids baissa éventuellement à 50 livres [23 kg], lui donnant l’apparence d’un squelette recouvert de peau. Ses proches étaient persuadés qu’elle était arrivée à sa fin mais Florence Nightingale Shirlaw n’avait pas encore abandonné la partie.

Elle avait lu à propos de William Branham et de l’immense succès qu’il avait à prier pour les malades. En 1946, il avait dit qu’il avait reçu d’un ange la commission d’apporter un don de guérison divine aux peuples de la terre. L’ange lui avait dit que s’il était sincère et que s’il pouvait amener les gens à le croire lorsqu’il priait, rien ne résisterait à sa prière, pas même le cancer. Mlle Shirlaw lui avait fait parvenir un billet d’avion et l’avait supplié de venir prier pour elle en Afrique du Sud. Malheureusement, l’évangéliste avait déjà planifié un voyage en Suède, en Norvège et en Finlande. Lorsque Florence Shirlaw apprit que Frère Branham ferait escale à Londres pour prier pour le Roi George VI, elle avait loué un avion-taxi et s’était rendue à Londres. Son avion avait atterri seulement quelques minutes après celui transportant l’évangéliste américain. À ce moment, Florence était déjà presque morte. Ses veines s’étaient affaissées, de sorte que son infirmière ne pouvait plus y insérer une aiguille pour la nourrir par intraveineuse. Sa voix n’était plus qu’un murmure, sa respiration était devenue superficielle et son pouls était lent et faible. William Branham demanda à Dieu de la guérir dans le Nom de Jésus-Christ puis prophétisa : «Ainsi dit le Seigneur : “Tu vivras et ne mourras pas.”» Aussi improbable que semblait l’accomplissement de cette prophétie, elle se réalisa. L’article montrait une photographie récente de Florence Nightingale Shirlaw pesant maintenant 155 livres [70 kg], souriante et resplendissante de vie et d’énergie.

Willie Upshaw remit l’article de journal dans la poche de son veston bleu. Sa foi brûlait comme un feu de brousse attisé par un vent fort de Californie. S’il pouvait seulement parvenir à cette ligne de prière tout de suite...

Son taxi, pris dans l’embouteillage, ralentit encore puis s’immobilisa complètement ; la carte de prière semblait encore plus inaccessible. Willie murmura : «Ne laisse rien te décourager et n’abandonne jamais.»

HOWARD BRANHAM cogna doucement à la porte de la chambre d’hôtel de son frère. «Billy» dit-il doucement, «la réunion est sur le point de commencer. Nous allons être en retard si nous ne partons pas maintenant.»

Il attendit la réponse. Elle ne vint pas. Howard leva la main pour cogner plus fort puis se ravisa. Ils en étaient à leur quatrième jour à Los Angeles et il pouvait voir que son frère ressentait la tension et la fatigue provoquées par le fait de prier pour les malades. Pourtant, Howard n’avait jamais vu son frère s’endormir avant une réunion. Il était plus probable qu’il soit concentré en prière. Howard descendit donc au restaurant de l’hôtel, commanda un lait malté frappé et se mit à le siroter lentement avec une paille. Lorsqu’il eut terminé son lait, il remonta à l’étage pour cogner de nouveau à la porte de la chambre. Cette fois-ci, la porte était entrebâillée.

William Branham ne dit pas un mot à son frère durant tout le trajet jusqu’au Calvary Temple. Ses pensées étaient centrées sur le Saint-Esprit. L’ange du Seigneur lui avait rendu visite dans la chambre d’hôtel. Même lorsqu’il ne pouvait pas le voir, Bill pouvait toujours sentir la présence de l’ange du Seigneur qui s’approchait. Il sentait une pression sur sa peau, comme une brise chargée d’électricité. Dans la présence de cet être surnaturel, Bill se sentait comme engourdi par la crainte et le respect. Même s’il l’avait rencontré des centaines de fois, il ne pouvait empêcher une certaine appréhension de l’envahir à sa venue. Toutefois, cette crainte diminuait dès que l’ange lui adressait la parole. Souvent, des visions suivaient sur lesquelles Bill n’avait aucun contrôle. Lors de tels moments, il ne pouvait même pas contrôler sa propre voix. C’est la raison pour laquelle il ne dit rien à son frère Howard en route vers l’église. Il ne voulait pas perturber l’onction du Saint-Esprit qui était sur lui car il savait que son don se mettrait automatiquement en opération sous cette onction, ce qui drainerait son énergie et il avait besoin de conserver ses forces pour la réunion de ce soir.

Comme ils étaient arrivés au Calvary Temple plus tard que prévu, Bill ne fut pas surpris de voir son gérant de campagne, W.J. Ern Baxter, derrière la chaire en train de prêcher. Dès qu’il aperçut Bill, Baxter mit fin à son sermon et demanda à la foule de chanter la chanson thème des campagnes Branham :

Crois seulement, crois seulement,

Tout est possible, crois seulement...

Après avoir salué son auditoire, Bill demanda si ceux qui étaient assis à l’arrière pouvaient l’entendre. Il n’y eut pas assez de mains levées pour qu’il en soit satisfait alors il demanda au technicien du son d’augmenter le volume. Ceci était un ajustement très fréquent, dû à la différence de taille entre Bill et son gérant de campagne. Bien qu’ils soient tous deux presque du même âge, ils étaient cependant d’apparence et d’allure tout à fait opposées. Ern Baxter faisait penser à un gros ours, mesurant plus de six pieds [1,80 m], avec une énorme cage thoracique d’où jaillissaient de puissants sermons avec sa voix de baryton. Baxter portait des lunettes dont la monture métallique accentuait la forme plutôt carrée de sa tête et sa chevelure était épaisse et drue. William Branham, de son côté, ne mesurait que cinq pieds sept pouces [1,60 m] et pesait 153 livres [70 kg]. À 42 ans, les cheveux de Bill étaient clairsemés sur le sommet de sa tête et calaient au niveau des tempes mettant en évidence l’inclinaison prononcée de son grand front. Il avait les yeux légèrement enfoncés dans leurs orbites, donnant l’impression d’une concentration intense, comme celle d’un aigle au sommet d’une falaise escarpée, scrutant la vallée et ne laissant aucun mouvement lui échapper.

Depuis le commencement de son ministère national en juin 1946, jusqu’à cette campagne de Los Angeles en février 1951, William Branham avait concentré la plus grande part de son énergie à prier pour les malades. S’il lui arrivait de prêcher avant d’appeler la ligne de prière, c’était habituellement un court sermon sur les bases bibliques de la guérison divine. Même lorsqu’il ne prêchait pas, il prenait toujours quelques minutes pour expliquer son ministère particulier. Il disait quelque chose du genre:

«Chers amis chrétiens, avant de commencer la ligne de prière, je veux que tous comprennent clairement que je ne prétends pas être un guérisseur divin. La seule chose que je puisse faire pour vous, c’est de prier pour vous. Aucun homme ne peut guérir. Dieu est le seul guérisseur.»

«Je ne suis qu’un homme, votre frère, avec un ministère authentifié par un être surnaturel, l’ange du Seigneur qui est venu de la présence de Dieu pour vous apporter ces bénédictions. Est-ce que le fil électrique qui conduit le courant à la lumière dit : “Regardez à quel point je suis un fil merveilleux?” Non, le fil n’a rien à voir avec la lumière. C’est le courant qui passe dans le fil qui crée la lumière. Je suis ce fil électrique. Je ne produis pas de lumière par moi-même ; elle doit être allumée par une autre source. Comprenez-vous que je donne la gloire à Jésus-Christ? Ce n’est pas de moi ; tout vient de Lui.»

«Il y a des gens qui croient que les anges ne font pas partie du Nouveau Testament et que c’était seulement le Saint-Esprit qui dirigeait l’église primitive. Il est vrai que le Saint-Esprit guidait l’église, mais les anges exercent toujours leur ministère dans chaque âge. Rappelez-vous dans Actes au chapitre 8, l’ange du Seigneur est apparu à Philippe et lui a dit d’aller dans le désert de Gaza et de témoigner à cet eunuque éthiopien. Et lorsque Pierre était en prison, l’ange du Seigneur a brillé comme une lumière au-dessus de lui, l’a touché, a brisé ses chaînes et l’a guidé à l’extérieur.[1] Et n’oubliez pas Saint Paul. Après avoir passé 14 jours et nuits dans cette tempête sur la mer, alors que tout espoir d’être sauvé semblait perdu, Paul dit : “Je vous exhorte à prendre courage ; car un ange du Dieu à qui j’appartiens et que je sers, m’est apparu cette nuit et m’a dit qu’aucun de vous ne périrait. J’ai cette confiance en Dieu qu’il en sera comme il m’a été dit.”[2] Jean le révélateur a écrit dans le dernier chapitre de la Bible : “Moi, Jésus, J’ai envoyé Mon ange pour vous attester ces choses dans les Églises.”[3] Voyez, le livre de l’Apocalypse fut révélé à Jean par l’ange du Seigneur. Et Jean est tombé à genoux pour adorer l’ange mais celui-ci l’arrêta en disant : “Garde-toi de le faire! Je suis ton compagnon de service et celui de tes frères les prophètes.”[4] L’esprit prophétique qui a été avec les prophètes à travers les âges était là, prophétisant à travers Jean, lui montrant le futur par un ange. Ce même Esprit est présent dans ce bâtiment ce soir. Il est le même hier, aujourd’hui et pour toujours. N’essayez pas de comprendre ; acceptez cela seulement.»

En ce soir de février 1951, pendant qu’il expliquait son ministère à son auditoire à Los Angeles, Bill sentit l’ange du Seigneur le quitter pour se déplacer au-dessus des auditeurs. En soi, cela n’était pas inhabituel, sauf que l’ange ne le faisait habituellement pas avant que la ligne de prière ne soit commencée et que le niveau de foi des gens n’ait atteint un niveau plus élevé. Peut-être y avait-il quelqu’un dans le bâtiment ayant déjà une foi très élevée. Bill étudiait la foule tout en parlant. C’est alors qu’il la vit : une colonne de feu brillant avec autant d’éclat que le flash d’une caméra. Elle était suspendue au-dessus d’un vieil homme mince assis à l’arrière du sanctuaire, près d’une allée.

Bill observa la lumière surnaturelle jusqu’à ce qu’elle devienne une vision. Bien que ses yeux restaient grands ouverts, il ne pouvait plus voir le sanctuaire bondé du Calvary Temple. Au lieu de cela, il voyait un garçon tirer une charrette près d’une meule de foin par une belle journée d’été. Le garçon grimpa jusqu’au sommet du tas de foin et se mit à lancer du foin dans la charrette à l’aide d’une fourche. Une partie de l’esprit de Bill était vaguement consciente qu’il se trouvait encore au Calvary Temple, s’adressant à des milliers de personnes ; mais la partie active de son esprit se trouvait près de ce tas de foin, observant le déroulement d’un drame. Il avait l’impression d’être à deux endroits en même temps.

Il continua à parler dans le micro tout en observant la scène. «Je vois un garçon jouer au sommet d’une grosse meule de foin. Il est vêtu de façon étrange. Oh! Il est tombé du tas de foin et son dos a heurté la charrette. Je vois un homme le prendre dans ses bras et le transporter chez le médecin. Le médecin a une moustache blanche et porte des lunettes qui lui glissent sur le bout du nez. Je vois le médecin essayer de replacer le dos du garçon mais c’est peine perdue. Il n’y a rien qu’il puisse faire. Le médecin l’envoie chez lui se mettre au lit. L’état du garçon empire au point où il ne peut même plus supporter les vibrations produites par les pas de quelqu’un qui marche sur le plancher de sa chambre. Je vois des gens vriller des trous dans le plancher de bois afin de réduire les vibrations. Maintenant le garçon est en train de faire un certain travail... oh, il est en train d’écrire. Maintenant il devient un homme éminent. Je peux les voir le déplacer à l’aide d’un fauteuil roulant ; il peut même marcher s’il utilise des béquilles et un corset orthopédique. Je le vois assis sur un banc et la foule applaudit ses discours. Et, mes amis, je ne sais pas pourquoi, mais je vois la Maison Blanche à Washington D.C. Maintenant la vision m’a quitté.»

La succession rapide de ces scènes disparut et Bill voyait de nouveau les gens dans la salle du Calvary Temple. Il ne pouvait plus voir la lumière de l’ange à l’arrière du sanctuaire, alors il étudia les visages des personnes assises près de l’endroit où la lumière s’était tenue. «Le voilà» dit Bill en montrant quelqu’un du doigt. «C’est le vieil homme assis là, à l’arrière, avec cette paire de béquilles posées là dans l’allée tout près de son siège.»

Pendant que tous se retournaient pour regarder, Bill demanda à Howard combien de cartes de prière il avait distribué. Howard distribuait habituellement 100 nouvelles cartes à chaque soir de la campagne. Chaque carte portait une lettre et un chiffre. Bill choisissait un numéro au hasard, tel que 85, puis il demandait à ceux qui avaient les numéros de 85 à 100 de s’avancer pour former la ligne de prière. Comme une lettre différente de l’alphabet était utilisée à chaque soir, chaque numéro 85 n’était valide que pour une seule réunion. Cette méthode rendait le processus de sélection équitable ; tous ceux qui désiraient que Bill prie pour eux avaient la même chance de faire partie de la ligne de prière.

Pendant que Howard alignait les gens dans une allée latérale, Ern Baxter s’approcha de Bill et dit : «Frère Branham, connaissez-vous l’homme pour lequel vous avez eu la vision?»

«Non, Monsieur, je ne le connais pas.»

«Il s’agit de William Upshaw, un ancien congressiste des États-Unis. Il désire vous parler alors je lui ai apporté un micro à l’arrière.»

Un technicien relia un micro portatif à l’amplificateur central de l’auditorium. La voix de M. Upshaw se fit entendre dans les haut-parleurs. «Mon fils, comment avez-vous su que j’étais tombé et que je m’étais blessé lorsque j’étais garçon?»

«Monsieur» répondit Bill «je n’ai jamais entendu parler de vous auparavant. Je ne peux dire que ce que j’ai vu dans la vision.»

«Bien, c’est exactement ce qui s’est produit. Mon nom est William Upshaw et j’ai été un congressiste de la Géorgie pendant huit ans. J’ai fait campagne en 1932 pour devenir Président des États-Unis mais j’ai subi la défaite parce que je militais contre la légalisation du whisky. Je m’y oppose encore aujourd’hui. J’étais âgé de 18 ans lorsque mon accident est survenu. J’ai été invalide pendant 66 ans ; 7 ans au lit et 59 ans utilisant des béquilles et des fauteuils roulants. On a prié pour moi des douzaines de fois, mais sans succès. Il y a quelques jours, le Dr Roy Davis m’a conseillé de venir vous voir pour que vous intercédiez auprès de Dieu en ma faveur. Mon fils, serai-je jamais guéri?»

«Je ne peux pas vous le dire, mon frère. Je ne le sais pas. Tout ce que je peux vous dire est ce que je vois en vision. Et maintenant la vision m’a quitté.»

Bill jeta un coup d’œil à Howard qui lui confirma que la ligne de prière était prête à commencer.

Même si le sanctuaire était bondé, peu de gens étaient autorisés à s’asseoir sur l’estrade derrière Bill. Il avait appris par expérience qu’il en était mieux ainsi. Lorsqu’il était sous l’onction, il devenait extrêmement sensible aux esprits. Si la plate-forme était remplie de gens, il pouvait sentir tous les sceptiques parmi eux et leurs doutes lui donnaient plus de difficulté à se concentrer sur les besoins des malades. Ceci n’était pas seulement sa propre idée ; ce principe avait ses précédents bibliques. Avant que Jésus ne ressuscite la fille de Jaïrus, il fit sortir tous les incrédules de la pièce. Pierre fit la même chose avant de prier pour Dorcas.[5] Mais il y avait aussi une autre raison pour laquelle Bill ne voulait pas de sceptiques derrière lui ; à chaque fois qu’une personne épileptique s’approchait de la présence de l’ange du Seigneur, le démon de l’épilepsie piquait une crise. S’il se trouvait des sceptiques à proximité, leurs doutes alimentaient ce démon et Bill avait plus de difficulté à contrôler la situation. Il permettait parfois aux ministres de s’asseoir derrière lui sur l’estrade, mais seulement s’il était certain que ceux-ci croyaient en son don. Il pouvait alors sentir leur foi et cela l’aidait.

Lorsque la première personne d’une ligne de prière se tenait devant lui, Bill lui parlait quelques moments afin de prendre contact avec son esprit, tout comme Jésus l’avait fait pour la femme samaritaine au puits de Jacob.[6] Si cette personne était chrétienne, Bill pouvait ressentir un esprit chaleureux. Il lui arrivait souvent d’apercevoir un halo lumineux autour de la tête d’un chrétien. Il n’avait alors pas besoin d’un long moment avant de sentir l’onction descendre sur lui. C’est à ce moment que les visions avaient l’habitude de se produire. Il voyait le malade s’élever dans les airs tout en rapetissant, un peu comme si cette personne s’éloignait de lui à une vitesse supersonique. Une scène se formait alors en miniature, montrant souvent un événement révélateur du passé de la personne, mais toujours quelque chose de spécifique à propos du problème de la personne. Ces visions étaient semblables à des rêves sauf que Bill était tout à fait éveillé et les scènes étaient claires et distinctes. Il lui arrivait de voir l’adresse de la personne sur le devant d’une maison ou un nom sur une boîte aux lettres. Souvent la nature du problème du patient lui était révélée en entendant le médecin donner son diagnostic. Lorsqu’il était en vision, il racontait aux auditeurs ce qu’il voyait, mais ses paroles n’étaient pas le produit de sa propre volonté. Après la vision, il lui arrivait parfois d’avoir un vague souvenir de ce qu’il avait vu ou de ce qu’il avait dit. Mais ceux qui se trouvaient dans la ligne de prière confirmaient toujours la véracité de ce qu’il leur avait dit pendant qu’il était sous l’onction. En d’autres occasions, Bill voyait des gens être guéris dans une vision. Tout ce qu’il voyait s’avérait toujours être la vérité.

Il y avait une différence distincte entre l’onction pour prêcher et l’onction pour voir des visions. La première donnait de l’énergie à Bill ; la seconde l’épuisait. Pourtant, Bill n’était pas un homme de faible constitution. Lorsqu’il allait à la chasse (ce qu’il faisait souvent), il pouvait marcher une distance de 35 milles [55 km] par jour sur un terrain accidenté, puis se lever le lendemain et parcourir encore la même distance... mais de voir une seule vision le fatiguait plus que s’il avait dû manier une masse pendant une heure. Pendant ces lignes de prière, les visions se déroulaient les unes après les autres. Après chaque vision, l’onction le quittait temporairement, planant au-dessus de lui comme une colombe, attendant que le prochain malade approche. Si l’onction ne l’avait pas quitté entre chaque personne, Bill se serait écroulé de fatigue après seulement quelques minutes. Son corps n’aurait pas pu supporter la tension. Déjà là, Bill ne pouvait dépasser une vingtaine de minutes, parfois trente, avant que l’épuisement ne l’engourdisse.

Ce soir-là, au Calvary Temple, les 15 personnes choisies pour former la ligne de prière s’avancèrent à tour de rôle, chacune ayant son problème particulier, lequel était discerné avec précision au moyen des visions. Lorsque vint le temps pour la dernière personne de s’approcher, Bill tituba comme s’il était sur le point de tomber. Ern Baxter s’avança pour l’attraper, mais Bill retrouva son équilibre. Il se frotta le visage. Ses lèvres lui semblaient épaisses et sa peau picotait comme si sa circulation sanguine était insuffisante.

Soudainement, une autre vision apparut. Bill regardait un jeune médecin portant un sarrau blanc. Le médecin portait d’épaisses lunettes et un réflecteur rond sur le front. Croisant les bras, le médecin baissa les yeux et secoua la tête avec découragement. Bill suivit le regard du médecin et dit : «Je vois un jeune médecin, grand et mince ; il porte des lunettes à montures oranges. Il est en train d’opérer une petite fille d’environ cinq ou six ans. Il lui a enlevé les amygdales mais quelque chose a mal tourné et elle est restée paralysée des épaules jusqu’aux pieds.»

Bill entendit une femme crier au moment même où la vision le quittait. Une corpulente femme noire quitta le fin fond du sanctuaire et s’avança d’un pas résolu. Elle tirait une civière sur roues en criant répétitivement : «Seigneur ait pitié! C’était mon bébé!» Plusieurs placiers essayèrent de l’arrêter. Mais la femme les repoussait les uns après les autres, comme un joueur de football plaquant ses opposants. Finalement, un assez grand nombre d’hommes se placèrent en ligne devant elle et elle dut s’arrêter. Mais elle continua de crier : «Pasteur, c’était mon bébé! Et c’est exactement ce à quoi ressemblait le médecin. Cela s’est produit il y a deux ans. Elle n’a jamais marché depuis. Est-elle guérie?»

«Je ne le sais pas, tantine. Comme je l’ai dit au congressiste un peu plus tôt, tout ce que je peux dire c’est ce que je vois dans la vision. Est-ce là votre fille sur la civière?»

«Oui. J’ai prié et prié pour sa guérison.»

«Eh bien! Tantine, je peux prier pour elle et peut-être que le Seigneur Jésus va la guérir. Mais je ne peux pas vous le garantir par moi-même.» Il se tourna vers son frère. «Est-ce là la dernière personne dans la ligne de prière?»

Howard acquiesça et fit signe au dernier malade de s’avancer. Bill remarqua quelque chose qui ressemblait à une bande sombre se déplacer juste au-dessus de la tête des gens. Comme il l’observait, la bande prit de l’expansion et devint une rue. Puis il vit une petite fille noire sautillant dans cette rue, berçant une poupée dans ses bras.

Bill dit à la mère : «Tantine, le Seigneur Jésus a récompensé votre foi. Votre petite fille est guérie.»

Toute tremblante d’émotion, la mère se pencha au-dessus de la civière et embrassa sa fille. Puis elle leva les yeux et demanda : «Pasteur, quand mon bébé sera-t-elle guérie?»

«Elle est déjà guérie, tantine.»

Pendant que la mère regardait l’évangéliste, la fillette était descendue doucement de la civière sans faire de bruit. Aussitôt qu’elle fut certaine que ses jambes la supporteraient, la fillette poussa un cri. Pivotant sur elle-même pour voir ce qu’il en était, la mère poussa aussi un cri, puis s’évanouit dans les bras des placiers. La minute d’après, mère et fille montaient l’allée centrale en se tenant par la main tout en louant Dieu. La foule ajouta ses louanges aux leurs avec enthousiasme.

Bill les regarda s’éloigner jusqu’à ce qu’elles aient franchi la porte. «Voyez ce que le Seigneur Jésus peut faire» dit-il, en articulant avec difficulté tant il se sentait faible. Il allait se tourner pour parler à la dernière femme qui attendait toujours son tour dans la ligne de prière lorsqu’un mouvement, perçu du coin de l’œil, capta son attention. Regardant attentivement, Bill vit l’ancien membre du Congrès descendant joyeusement la même rue qui se trouvait toujours au-dessus de l’auditoire. Le congressiste Upshaw était vêtu d’un complet brun chocolat aux fines rayures blanches et portait un chapeau de cow-boy à la mode du Sud. Il souriait cordialement et soulevait la pointe de son chapeau en saluant les passants.

Bill porta son regard vers la chaise où était assis M. Upshaw près de l’allée centrale. En ce moment, ici à l’église, le congressiste âgé portait un complet bleu et une cravate rouge.

«M. le Congressiste, possédez-vous un complet brun aux fines rayures blanches?»

Le vieux gentleman tenait toujours le micro entre ses mains. «Oui, mon fils. J’en ai acheté un avant-hier.»

Bill savait maintenant ce qui allait se produire. «Mon frère, vous avez été un homme profondément respectueux et vous avez honoré Dieu pendant toutes ces années. Dieu vous récompense maintenant en rendant vos derniers jours heureux. Vous pouvez marcher maintenant, M. le Congressiste. Le Seigneur Jésus-Christ vous a guéri.»

M. Upshaw ne savait pas trop quoi faire. Il dit : «Gloire à Dieu. Mon fils, si Jésus-Christ me laisse marcher sans mes béquilles, je passerai le reste de mes jours à Le glorifier.»

«M. le Congressiste...» Bill fit une pause et tituba. Il pouvait sentir ses forces le quitter rapidement. Ern Baxter et Leroy Kopp le soutinrent et commencèrent à le guider vers la sortie. Bill murmura : «M. le Congressiste, dans le Nom de Jésus-Christ, levez-vous sur vos pieds et marchez. Dieu vous a guéri. C’est un “Ainsi dit le Seigneur”!»

Le Pasteur Leroy Kopp retourna au micro et dit : «Frère Branham dit que M. le Congressiste

est guéri!»

Willie Upshaw sentit son cœur bondir dans sa poitrine. Il se dit en lui-même : «Frère Branham connaît la pensée de Dieu, alors je dois faire un pas de foi et accepter Jésus-Christ comme mon Guérisseur.»

Il sentit quelque chose de froid lui traverser le corps. Donnant un coup de pied sur ses béquilles, il se leva et fit un pas dans l’allée. Les nerfs de ses jambes, qui avaient été morts pendant de longues années, se mirent à picoter de vie. Ses muscles rabougris se remplirent de sang. Miraculeusement, ses jambes le supportèrent. Il fit un autre pas, puis un autre et un autre. Ça y était! Il marchait sans aucune aide!

Pendant que les auditeurs louaient Dieu avec exubérance, Willie Upshaw descendit l’allée jusqu’à l’avant et serra la main d’un Leroy Kopp plutôt étonné. Puis, se tenant là où tous pouvaient le voir, Willie Upshaw se pencha et alla toucher à ses orteils.[7]


 



[1] Actes 12

[2] Actes 27

[3] Apocalypse 22:16

[4] Apocalypse 19:10

[5] Marc 5:35, Actes 9:36-42

[6] Jean 4:6-19

[7] Le miracle que William Upshaw a expérimenté fut permanent. Il a marché normalement depuis cette soirée en février 1951 jusqu’à son décès le 21 novembre 1952 à l’âge de 86 ans.

WLLIE UPSHAW avait attendu cette soirée pendant 66 ans. «C’est maintenant ou jamais» pensa-t-il anxieusement. «Si je pouvais seulement arriver à temps...» Il aurait voulu que le taxi roule plus vite mais la circulation dense de l’heure de pointe imposait au chauffeur une conduite plus lente. Willie jeta un coup d’œil à sa montre. La réunion de William Branham allait commencer d’un moment à l’autre. S’il n’arrivait pas à temps pour obtenir une carte de prière, ce voyage se révèlerait peut-être vain! Sans carte de prière, il ne pourrait pas aller dans la ligne de prière ; et s’il n’allait pas dans la ligne de prière, comment pourrait-il jamais réaliser son rêve?

Pendant plus d’un demi-siècle, il avait entretenu un rêve fou dans son cœur, la petite braise ardente d’un désir qu’il refusait de laisser se consumer. Willie Upshaw voulait marcher sans aide. C’était aussi simple que ça. Et aussi compliqué. La dernière fois qu’il avait marché seul remontait à ses 18 ans, avant qu’il ne se soit fracturé le dos lors d’un accident de la ferme. Durant toutes les pénibles années qui suivirent, il avait lutté pour vivre à la hauteur de sa devise : «Ne laisse rien te décourager et nabandonne jamais.» Croyant en un Dieu à la puissance illimitée, Willie avait prié avec ferveur pour marcher à nouveau. Dieu l’avait guéri de plusieurs maladies, incluant un cancer inopérable au visage. Malgré ses nombreuses années de prière pour obtenir la foi appropriée, il n’avait toutefois pas réussi à atteindre le niveau de foi nécessaire pour se lever et marcher, jusqu’à maintenant, peut-être...

Le jour précédent, Willie Upshaw et sa femme Lily, assistaient à une convention de ministres baptistes non loin de sa demeure à Santa Monica en Californie. Ils y rencontrèrent le Dr Roy Davis, le ministre qui avait ordonné Bill au ministère en 1932. Willie Upshaw avait demandé au Dr Davis si tous les comptes rendus phénoménaux qu’il avait entendus à propos de William Branham étaient vrais. Roy Davis lui raconta un miracle dont il avait été témoin. Un diacre de son église, Frank Shoemaker, avait perdu l’usage de ses deux jambes lorsqu’il s’était fracturé le dos dix ans auparavant. Confiné à son fauteuil roulant, il se rendait utile en travaillant au bureau de l’église. L’année dernière, Shoemaker avait assisté à une campagne de guérison Branham et, ce soir-là, William Branham avait eu une vision de Frank Shoemaker en train de marcher. Shoemaker se leva immédiatement et s’éloigna de son fauteuil roulant en marchant. Davis lui dit que Frank Shoemaker marchait parfaitement bien depuis ce temps.

Cette histoire attisa la braise du rêve de Willie jusqu’à la rendre rougeoyante et fumante. Si jamais il parvenait à ce que William Branham prie pour lui, peut-être retrouverait-il, lui aussi, l’usage de ses jambes. Puis il apprit que William Branham s’apprêtait à terminer une campagne de guérison à Los Angeles. Soudainement, le vieux rêve de Willie se mit à brûler de nouveau. Il se rendit chez lui, fit ses bagages et réserva un siège sur le prochain vol pour Los Angeles. Ça y était! Ceci était probablement sa dernière chance! Voilà la raison pour laquelle il devait arriver à la réunion Branham assez tôt pour obtenir une carte de prière.

Malheureusement, la densité de la circulation augmentait, ralentissant son taxi davantage. Il se mit à jouer nerveusement avec un des rivets de son corset orthopédique.

«Willie» lui dit sa femme, «garde les yeux fixés sur le Seigneur. Dieu t’a déjà aidé à vaincre de si nombreuses épreuves. Pense à tout l’honneur qui Lui reviendra lorsque tu traverseras le continent, sans béquilles, pour témoigner de Lui en déclarant qu’Il est non seulement le Sauveur de ton âme mais aussi le Grand Médecin qui a guéri ton corps.»

Willie savait qu’elle avait raison, mais il lui semblait qu’une épaisse couverture de doutes essayait toujours d’étouffer sa flamme. Il pensa à quel point cela faisait longtemps qu’il avait marché sans béquilles. Son accident avait eu lieu en 1884. On était maintenant en 1951, soixante-six ans plus tard.

Tant de choses s’étaient produites depuis ce jour fatidique de l’été 1884. Les sept années qu’il avait passées au lit lui avaient semblé tenir du cauchemar. Pourtant, ces années agonisantes l’avaient rapproché de Dieu. Dans son lit de souffrances, il écrivit un livre inspirateur : Willie le déterminé, ou les réflexions d'un reclus. Ce livre démarra sa longue carrière dans la fonction publique. Les ventes de Willie le déterminé lui procurèrent assez d’argent pour faire ses études supérieures. Plus tard, il fonda le Magazine de lÂge d'or dont il fut l’éditeur pendant 13 ans.

Il se lança ensuite en politique. En 1919, il gagna un siège au Congrès des États-Unis, élu par la population de la Géorgie. Willie était particulièrement fier des huit années qu’il avait servies à la Chambre des Représentants des États-Unis. Plusieurs de ses amis l’appelaient encore le Congressiste Upshaw. En 1932, il fit une campagne pour devenir Président des États-Unis à titre de candidat pour le Parti de la Prohibition.

Après sa défaite présidentielle, il travailla bénévolement dans le secteur de l’éducation chrétienne, aidant les enfants désavantagés à se rendre aux études supérieures. Il visita des écoles dans 42 états, donnant des conférences devant des dizaines de milliers d’étudiants, les encourageant à rallier leur raison d’être aux desseins de Dieu. En 1938, à l’âge de 72 ans, il fut ordonné ministre baptiste, puis il remplit deux mandats en qualité de vice-président de la Convention Baptiste du Sud. Il officia même à titre de vice-président du Collège et Séminaire Baptiste Linda Vista à San Diego en Californie.

Maintenant âgé de 84 ans, Willie Upshaw se sentait fier de sa carrière distinguée, tout particulièrement en raison de son handicap. Au cours de toutes ces années difficiles, il n’abandonna jamais son rêve de marcher à nouveau aussi librement que tout autre homme. Il avait toujours cru que s’il réussissait à atteindre le niveau approprié de foi, toutes choses seraient possibles.

Pendant que le chauffeur de taxi tentait de progresser à travers la circulation dense, Willie sortit une coupure de journal de sa poche et la relut pour s’encourager. L’article concernait un miracle qui s’était produit l’année précédente dans la vie de Florence Nightingale Shirlaw, une parente de Florence Nightingale, l’infirmière anglaise renommée du 19e siècle. Florence Shirlaw demeurait en Afrique du Sud. Même si elle n’était que dans la trentaine, sa vie était étouffée par un cancer malin de la portion stomacale du duodénum, ce qui l’empêchait de digérer sa nourriture. Comme le cancer était inopérable, sa condition semblait sans espoir. Son médecin l’avait nourrie par intraveineuse pendant plusieurs mois pendant que ses muscles se desséchaient et que sa peau se flétrissait à tel point qu’elle adhérait à ses os. Son poids baissa éventuellement à 50 livres [23 kg], lui donnant l’apparence d’un squelette recouvert de peau. Ses proches étaient persuadés qu’elle était arrivée à sa fin mais Florence Nightingale Shirlaw n’avait pas encore abandonné la partie.

Elle avait lu à propos de William Branham et de l’immense succès qu’il avait à prier pour les malades. En 1946, il avait dit qu’il avait reçu d’un ange la commission d’apporter un don de guérison divine aux peuples de la terre. L’ange lui avait dit que s’il était sincère et que s’il pouvait amener les gens à le croire lorsqu’il priait, rien ne résisterait à sa prière, pas même le cancer. Mlle Shirlaw lui avait fait parvenir un billet d’avion et l’avait supplié de venir prier pour elle en Afrique du Sud. Malheureusement, l’évangéliste avait déjà planifié un voyage en Suède, en Norvège et en Finlande. Lorsque Florence Shirlaw apprit que Frère Branham ferait escale à Londres pour prier pour le Roi George VI, elle avait loué un avion-taxi et s’était rendue à Londres. Son avion avait atterri seulement quelques minutes après celui transportant l’évangéliste américain. À ce moment, Florence était déjà presque morte. Ses veines s’étaient affaissées, de sorte que son infirmière ne pouvait plus y insérer une aiguille pour la nourrir par intraveineuse. Sa voix n’était plus qu’un murmure, sa respiration était devenue superficielle et son pouls était lent et faible. William Branham demanda à Dieu de la guérir dans le Nom de Jésus-Christ puis prophétisa : «Ainsi dit le Seigneur : “Tu vivras et ne mourras pas.”» Aussi improbable que semblait l’accomplissement de cette prophétie, elle se réalisa. L’article montrait une photographie récente de Florence Nightingale Shirlaw pesant maintenant 155 livres [70 kg], souriante et resplendissante de vie et d’énergie.

Willie Upshaw remit l’article de journal dans la poche de son veston bleu. Sa foi brûlait comme un feu de brousse attisé par un vent fort de Californie. S’il pouvait seulement parvenir à cette ligne de prière tout de suite...

Son taxi, pris dans l’embouteillage, ralentit encore puis s’immobilisa complètement ; la carte de prière semblait encore plus inaccessible. Willie murmura : «Ne laisse rien te décourager et n’abandonne jamais.»

HOWARD BRANHAM cogna doucement à la porte de la chambre d’hôtel de son frère. «Billy» dit-il doucement, «la réunion est sur le point de commencer. Nous allons être en retard si nous ne partons pas maintenant.»

Il attendit la réponse. Elle ne vint pas. Howard leva la main pour cogner plus fort puis se ravisa. Ils en étaient à leur quatrième jour à Los Angeles et il pouvait voir que son frère ressentait la tension et la fatigue provoquées par le fait de prier pour les malades. Pourtant, Howard n’avait jamais vu son frère s’endormir avant une réunion. Il était plus probable qu’il soit concentré en prière. Howard descendit donc au restaurant de l’hôtel, commanda un lait malté frappé et se mit à le siroter lentement avec une paille. Lorsqu’il eut terminé son lait, il remonta à l’étage pour cogner de nouveau à la porte de la chambre. Cette fois-ci, la porte était entrebâillée.

William Branham ne dit pas un mot à son frère durant tout le trajet jusqu’au Calvary Temple. Ses pensées étaient centrées sur le Saint-Esprit. L’ange du Seigneur lui avait rendu visite dans la chambre d’hôtel. Même lorsqu’il ne pouvait pas le voir, Bill pouvait toujours sentir la présence de l’ange du Seigneur qui s’approchait. Il sentait une pression sur sa peau, comme une brise chargée d’électricité. Dans la présence de cet être surnaturel, Bill se sentait comme engourdi par la crainte et le respect. Même s’il l’avait rencontré des centaines de fois, il ne pouvait empêcher une certaine appréhension de l’envahir à sa venue. Toutefois, cette crainte diminuait dès que l’ange lui adressait la parole. Souvent, des visions suivaient sur lesquelles Bill n’avait aucun contrôle. Lors de tels moments, il ne pouvait même pas contrôler sa propre voix. C’est la raison pour laquelle il ne dit rien à son frère Howard en route vers l’église. Il ne voulait pas perturber l’onction du Saint-Esprit qui était sur lui car il savait que son don se mettrait automatiquement en opération sous cette onction, ce qui drainerait son énergie et il avait besoin de conserver ses forces pour la réunion de ce soir.

Comme ils étaient arrivés au Calvary Temple plus tard que prévu, Bill ne fut pas surpris de voir son gérant de campagne, W.J. Ern Baxter, derrière la chaire en train de prêcher. Dès qu’il aperçut Bill, Baxter mit fin à son sermon et demanda à la foule de chanter la chanson thème des campagnes Branham :

Crois seulement, crois seulement,

Tout est possible, crois seulement...

Après avoir salué son auditoire, Bill demanda si ceux qui étaient assis à l’arrière pouvaient l’entendre. Il n’y eut pas assez de mains levées pour qu’il en soit satisfait alors il demanda au technicien du son d’augmenter le volume. Ceci était un ajustement très fréquent, dû à la différence de taille entre Bill et son gérant de campagne. Bien qu’ils soient tous deux presque du même âge, ils étaient cependant d’apparence et d’allure tout à fait opposées. Ern Baxter faisait penser à un gros ours, mesurant plus de six pieds [1,80 m], avec une énorme cage thoracique d’où jaillissaient de puissants sermons avec sa voix de baryton. Baxter portait des lunettes dont la monture métallique accentuait la forme plutôt carrée de sa tête et sa chevelure était épaisse et drue. William Branham, de son côté, ne mesurait que cinq pieds sept pouces [1,60 m] et pesait 153 livres [70 kg]. À 42 ans, les cheveux de Bill étaient clairsemés sur le sommet de sa tête et calaient au niveau des tempes mettant en évidence l’inclinaison prononcée de son grand front. Il avait les yeux légèrement enfoncés dans leurs orbites, donnant l’impression d’une concentration intense, comme celle d’un aigle au sommet d’une falaise escarpée, scrutant la vallée et ne laissant aucun mouvement lui échapper.

Depuis le commencement de son ministère national en juin 1946, jusqu’à cette campagne de Los Angeles en février 1951, William Branham avait concentré la plus grande part de son énergie à prier pour les malades. S’il lui arrivait de prêcher avant d’appeler la ligne de prière, c’était habituellement un court sermon sur les bases bibliques de la guérison divine. Même lorsqu’il ne prêchait pas, il prenait toujours quelques minutes pour expliquer son ministère particulier. Il disait quelque chose du genre:

«Chers amis chrétiens, avant de commencer la ligne de prière, je veux que tous comprennent clairement que je ne prétends pas être un guérisseur divin. La seule chose que je puisse faire pour vous, c’est de prier pour vous. Aucun homme ne peut guérir. Dieu est le seul guérisseur.»

«Je ne suis qu’un homme, votre frère, avec un ministère authentifié par un être surnaturel, l’ange du Seigneur qui est venu de la présence de Dieu pour vous apporter ces bénédictions. Est-ce que le fil électrique qui conduit le courant à la lumière dit : “Regardez à quel point je suis un fil merveilleux?” Non, le fil n’a rien à voir avec la lumière. C’est le courant qui passe dans le fil qui crée la lumière. Je suis ce fil électrique. Je ne produis pas de lumière par moi-même ; elle doit être allumée par une autre source. Comprenez-vous que je donne la gloire à Jésus-Christ? Ce n’est pas de moi ; tout vient de Lui.»

«Il y a des gens qui croient que les anges ne font pas partie du Nouveau Testament et que c’était seulement le Saint-Esprit qui dirigeait l’église primitive. Il est vrai que le Saint-Esprit guidait l’église, mais les anges exercent toujours leur ministère dans chaque âge. Rappelez-vous dans Actes au chapitre 8, l’ange du Seigneur est apparu à Philippe et lui a dit d’aller dans le désert de Gaza et de témoigner à cet eunuque éthiopien. Et lorsque Pierre était en prison, l’ange du Seigneur a brillé comme une lumière au-dessus de lui, l’a touché, a brisé ses chaînes et l’a guidé à l’extérieur.[1] Et n’oubliez pas Saint Paul. Après avoir passé 14 jours et nuits dans cette tempête sur la mer, alors que tout espoir d’être sauvé semblait perdu, Paul dit : “Je vous exhorte à prendre courage ; car un ange du Dieu à qui j’appartiens et que je sers, m’est apparu cette nuit et m’a dit qu’aucun de vous ne périrait. J’ai cette confiance en Dieu qu’il en sera comme il m’a été dit.”[2] Jean le révélateur a écrit dans le dernier chapitre de la Bible : “Moi, Jésus, J’ai envoyé Mon ange pour vous attester ces choses dans les Églises.”[3] Voyez, le livre de l’Apocalypse fut révélé à Jean par l’ange du Seigneur. Et Jean est tombé à genoux pour adorer l’ange mais celui-ci l’arrêta en disant : “Garde-toi de le faire! Je suis ton compagnon de service et celui de tes frères les prophètes.”[4] L’esprit prophétique qui a été avec les prophètes à travers les âges était là, prophétisant à travers Jean, lui montrant le futur par un ange. Ce même Esprit est présent dans ce bâtiment ce soir. Il est le même hier, aujourd’hui et pour toujours. N’essayez pas de comprendre ; acceptez cela seulement.»

En ce soir de février 1951, pendant qu’il expliquait son ministère à son auditoire à Los Angeles, Bill sentit l’ange du Seigneur le quitter pour se déplacer au-dessus des auditeurs. En soi, cela n’était pas inhabituel, sauf que l’ange ne le faisait habituellement pas avant que la ligne de prière ne soit commencée et que le niveau de foi des gens n’ait atteint un niveau plus élevé. Peut-être y avait-il quelqu’un dans le bâtiment ayant déjà une foi très élevée. Bill étudiait la foule tout en parlant. C’est alors qu’il la vit : une colonne de feu brillant avec autant d’éclat que le flash d’une caméra. Elle était suspendue au-dessus d’un vieil homme mince assis à l’arrière du sanctuaire, près d’une allée.

Bill observa la lumière surnaturelle jusqu’à ce qu’elle devienne une vision. Bien que ses yeux restaient grands ouverts, il ne pouvait plus voir le sanctuaire bondé du Calvary Temple. Au lieu de cela, il voyait un garçon tirer une charrette près d’une meule de foin par une belle journée d’été. Le garçon grimpa jusqu’au sommet du tas de foin et se mit à lancer du foin dans la charrette à l’aide d’une fourche. Une partie de l’esprit de Bill était vaguement consciente qu’il se trouvait encore au Calvary Temple, s’adressant à des milliers de personnes ; mais la partie active de son esprit se trouvait près de ce tas de foin, observant le déroulement d’un drame. Il avait l’impression d’être à deux endroits en même temps.

Il continua à parler dans le micro tout en observant la scène. «Je vois un garçon jouer au sommet d’une grosse meule de foin. Il est vêtu de façon étrange. Oh! Il est tombé du tas de foin et son dos a heurté la charrette. Je vois un homme le prendre dans ses bras et le transporter chez le médecin. Le médecin a une moustache blanche et porte des lunettes qui lui glissent sur le bout du nez. Je vois le médecin essayer de replacer le dos du garçon mais c’est peine perdue. Il n’y a rien qu’il puisse faire. Le médecin l’envoie chez lui se mettre au lit. L’état du garçon empire au point où il ne peut même plus supporter les vibrations produites par les pas de quelqu’un qui marche sur le plancher de sa chambre. Je vois des gens vriller des trous dans le plancher de bois afin de réduire les vibrations. Maintenant le garçon est en train de faire un certain travail... oh, il est en train d’écrire. Maintenant il devient un homme éminent. Je peux les voir le déplacer à l’aide d’un fauteuil roulant ; il peut même marcher s’il utilise des béquilles et un corset orthopédique. Je le vois assis sur un banc et la foule applaudit ses discours. Et, mes amis, je ne sais pas pourquoi, mais je vois la Maison Blanche à Washington D.C. Maintenant la vision m’a quitté.»

La succession rapide de ces scènes disparut et Bill voyait de nouveau les gens dans la salle du Calvary Temple. Il ne pouvait plus voir la lumière de l’ange à l’arrière du sanctuaire, alors il étudia les visages des personnes assises près de l’endroit où la lumière s’était tenue. «Le voilà» dit Bill en montrant quelqu’un du doigt. «C’est le vieil homme assis là, à l’arrière, avec cette paire de béquilles posées là dans l’allée tout près de son siège.»

Pendant que tous se retournaient pour regarder, Bill demanda à Howard combien de cartes de prière il avait distribué. Howard distribuait habituellement 100 nouvelles cartes à chaque soir de la campagne. Chaque carte portait une lettre et un chiffre. Bill choisissait un numéro au hasard, tel que 85, puis il demandait à ceux qui avaient les numéros de 85 à 100 de s’avancer pour former la ligne de prière. Comme une lettre différente de l’alphabet était utilisée à chaque soir, chaque numéro 85 n’était valide que pour une seule réunion. Cette méthode rendait le processus de sélection équitable ; tous ceux qui désiraient que Bill prie pour eux avaient la même chance de faire partie de la ligne de prière.

Pendant que Howard alignait les gens dans une allée latérale, Ern Baxter s’approcha de Bill et dit : «Frère Branham, connaissez-vous l’homme pour lequel vous avez eu la vision?»

«Non, Monsieur, je ne le connais pas.»

«Il s’agit de William Upshaw, un ancien congressiste des États-Unis. Il désire vous parler alors je lui ai apporté un micro à l’arrière.»

Un technicien relia un micro portatif à l’amplificateur central de l’auditorium. La voix de M. Upshaw se fit entendre dans les haut-parleurs. «Mon fils, comment avez-vous su que j’étais tombé et que je m’étais blessé lorsque j’étais garçon?»

«Monsieur» répondit Bill «je n’ai jamais entendu parler de vous auparavant. Je ne peux dire que ce que j’ai vu dans la vision.»

«Bien, c’est exactement ce qui s’est produit. Mon nom est William Upshaw et j’ai été un congressiste de la Géorgie pendant huit ans. J’ai fait campagne en 1932 pour devenir Président des États-Unis mais j’ai subi la défaite parce que je militais contre la légalisation du whisky. Je m’y oppose encore aujourd’hui. J’étais âgé de 18 ans lorsque mon accident est survenu. J’ai été invalide pendant 66 ans ; 7 ans au lit et 59 ans utilisant des béquilles et des fauteuils roulants. On a prié pour moi des douzaines de fois, mais sans succès. Il y a quelques jours, le Dr Roy Davis m’a conseillé de venir vous voir pour que vous intercédiez auprès de Dieu en ma faveur. Mon fils, serai-je jamais guéri?»

«Je ne peux pas vous le dire, mon frère. Je ne le sais pas. Tout ce que je peux vous dire est ce que je vois en vision. Et maintenant la vision m’a quitté.»

Bill jeta un coup d’œil à Howard qui lui confirma que la ligne de prière était prête à commencer.

Même si le sanctuaire était bondé, peu de gens étaient autorisés à s’asseoir sur l’estrade derrière Bill. Il avait appris par expérience qu’il en était mieux ainsi. Lorsqu’il était sous l’onction, il devenait extrêmement sensible aux esprits. Si la plate-forme était remplie de gens, il pouvait sentir tous les sceptiques parmi eux et leurs doutes lui donnaient plus de difficulté à se concentrer sur les besoins des malades. Ceci n’était pas seulement sa propre idée ; ce principe avait ses précédents bibliques. Avant que Jésus ne ressuscite la fille de Jaïrus, il fit sortir tous les incrédules de la pièce. Pierre fit la même chose avant de prier pour Dorcas.[5] Mais il y avait aussi une autre raison pour laquelle Bill ne voulait pas de sceptiques derrière lui ; à chaque fois qu’une personne épileptique s’approchait de la présence de l’ange du Seigneur, le démon de l’épilepsie piquait une crise. S’il se trouvait des sceptiques à proximité, leurs doutes alimentaient ce démon et Bill avait plus de difficulté à contrôler la situation. Il permettait parfois aux ministres de s’asseoir derrière lui sur l’estrade, mais seulement s’il était certain que ceux-ci croyaient en son don. Il pouvait alors sentir leur foi et cela l’aidait.

Lorsque la première personne d’une ligne de prière se tenait devant lui, Bill lui parlait quelques moments afin de prendre contact avec son esprit, tout comme Jésus l’avait fait pour la femme samaritaine au puits de Jacob.[6] Si cette personne était chrétienne, Bill pouvait ressentir un esprit chaleureux. Il lui arrivait souvent d’apercevoir un halo lumineux autour de la tête d’un chrétien. Il n’avait alors pas besoin d’un long moment avant de sentir l’onction descendre sur lui. C’est à ce moment que les visions avaient l’habitude de se produire. Il voyait le malade s’élever dans les airs tout en rapetissant, un peu comme si cette personne s’éloignait de lui à une vitesse supersonique. Une scène se formait alors en miniature, montrant souvent un événement révélateur du passé de la personne, mais toujours quelque chose de spécifique à propos du problème de la personne. Ces visions étaient semblables à des rêves sauf que Bill était tout à fait éveillé et les scènes étaient claires et distinctes. Il lui arrivait de voir l’adresse de la personne sur le devant d’une maison ou un nom sur une boîte aux lettres. Souvent la nature du problème du patient lui était révélée en entendant le médecin donner son diagnostic. Lorsqu’il était en vision, il racontait aux auditeurs ce qu’il voyait, mais ses paroles n’étaient pas le produit de sa propre volonté. Après la vision, il lui arrivait parfois d’avoir un vague souvenir de ce qu’il avait vu ou de ce qu’il avait dit. Mais ceux qui se trouvaient dans la ligne de prière confirmaient toujours la véracité de ce qu’il leur avait dit pendant qu’il était sous l’onction. En d’autres occasions, Bill voyait des gens être guéris dans une vision. Tout ce qu’il voyait s’avérait toujours être la vérité.

Il y avait une différence distincte entre l’onction pour prêcher et l’onction pour voir des visions. La première donnait de l’énergie à Bill ; la seconde l’épuisait. Pourtant, Bill n’était pas un homme de faible constitution. Lorsqu’il allait à la chasse (ce qu’il faisait souvent), il pouvait marcher une distance de 35 milles [55 km] par jour sur un terrain accidenté, puis se lever le lendemain et parcourir encore la même distance... mais de voir une seule vision le fatiguait plus que s’il avait dû manier une masse pendant une heure. Pendant ces lignes de prière, les visions se déroulaient les unes après les autres. Après chaque vision, l’onction le quittait temporairement, planant au-dessus de lui comme une colombe, attendant que le prochain malade approche. Si l’onction ne l’avait pas quitté entre chaque personne, Bill se serait écroulé de fatigue après seulement quelques minutes. Son corps n’aurait pas pu supporter la tension. Déjà là, Bill ne pouvait dépasser une vingtaine de minutes, parfois trente, avant que l’épuisement ne l’engourdisse.

Ce soir-là, au Calvary Temple, les 15 personnes choisies pour former la ligne de prière s’avancèrent à tour de rôle, chacune ayant son problème particulier, lequel était discerné avec précision au moyen des visions. Lorsque vint le temps pour la dernière personne de s’approcher, Bill tituba comme s’il était sur le point de tomber. Ern Baxter s’avança pour l’attraper, mais Bill retrouva son équilibre. Il se frotta le visage. Ses lèvres lui semblaient épaisses et sa peau picotait comme si sa circulation sanguine était insuffisante.

Soudainement, une autre vision apparut. Bill regardait un jeune médecin portant un sarrau blanc. Le médecin portait d’épaisses lunettes et un réflecteur rond sur le front. Croisant les bras, le médecin baissa les yeux et secoua la tête avec découragement. Bill suivit le regard du médecin et dit : «Je vois un jeune médecin, grand et mince ; il porte des lunettes à montures oranges. Il est en train d’opérer une petite fille d’environ cinq ou six ans. Il lui a enlevé les amygdales mais quelque chose a mal tourné et elle est restée paralysée des épaules jusqu’aux pieds.»

Bill entendit une femme crier au moment même où la vision le quittait. Une corpulente femme noire quitta le fin fond du sanctuaire et s’avança d’un pas résolu. Elle tirait une civière sur roues en criant répétitivement : «Seigneur ait pitié! C’était mon bébé!» Plusieurs placiers essayèrent de l’arrêter. Mais la femme les repoussait les uns après les autres, comme un joueur de football plaquant ses opposants. Finalement, un assez grand nombre d’hommes se placèrent en ligne devant elle et elle dut s’arrêter. Mais elle continua de crier : «Pasteur, c’était mon bébé! Et c’est exactement ce à quoi ressemblait le médecin. Cela s’est produit il y a deux ans. Elle n’a jamais marché depuis. Est-elle guérie?»

«Je ne le sais pas, tantine. Comme je l’ai dit au congressiste un peu plus tôt, tout ce que je peux dire c’est ce que je vois dans la vision. Est-ce là votre fille sur la civière?»

«Oui. J’ai prié et prié pour sa guérison.»

«Eh bien! Tantine, je peux prier pour elle et peut-être que le Seigneur Jésus va la guérir. Mais je ne peux pas vous le garantir par moi-même.» Il se tourna vers son frère. «Est-ce là la dernière personne dans la ligne de prière?»

Howard acquiesça et fit signe au dernier malade de s’avancer. Bill remarqua quelque chose qui ressemblait à une bande sombre se déplacer juste au-dessus de la tête des gens. Comme il l’observait, la bande prit de l’expansion et devint une rue. Puis il vit une petite fille noire sautillant dans cette rue, berçant une poupée dans ses bras.

Bill dit à la mère : «Tantine, le Seigneur Jésus a récompensé votre foi. Votre petite fille est guérie.»

Toute tremblante d’émotion, la mère se pencha au-dessus de la civière et embrassa sa fille. Puis elle leva les yeux et demanda : «Pasteur, quand mon bébé sera-t-elle guérie?»

«Elle est déjà guérie, tantine.»

Pendant que la mère regardait l’évangéliste, la fillette était descendue doucement de la civière sans faire de bruit. Aussitôt qu’elle fut certaine que ses jambes la supporteraient, la fillette poussa un cri. Pivotant sur elle-même pour voir ce qu’il en était, la mère poussa aussi un cri, puis s’évanouit dans les bras des placiers. La minute d’après, mère et fille montaient l’allée centrale en se tenant par la main tout en louant Dieu. La foule ajouta ses louanges aux leurs avec enthousiasme.

Bill les regarda s’éloigner jusqu’à ce qu’elles aient franchi la porte. «Voyez ce que le Seigneur Jésus peut faire» dit-il, en articulant avec difficulté tant il se sentait faible. Il allait se tourner pour parler à la dernière femme qui attendait toujours son tour dans la ligne de prière lorsqu’un mouvement, perçu du coin de l’œil, capta son attention. Regardant attentivement, Bill vit l’ancien membre du Congrès descendant joyeusement la même rue qui se trouvait toujours au-dessus de l’auditoire. Le congressiste Upshaw était vêtu d’un complet brun chocolat aux fines rayures blanches et portait un chapeau de cow-boy à la mode du Sud. Il souriait cordialement et soulevait la pointe de son chapeau en saluant les passants.

Bill porta son regard vers la chaise où était assis M. Upshaw près de l’allée centrale. En ce moment, ici à l’église, le congressiste âgé portait un complet bleu et une cravate rouge.

«M. le Congressiste, possédez-vous un complet brun aux fines rayures blanches?»

Le vieux gentleman tenait toujours le micro entre ses mains. «Oui, mon fils. J’en ai acheté un avant-hier.»

Bill savait maintenant ce qui allait se produire. «Mon frère, vous avez été un homme profondément respectueux et vous avez honoré Dieu pendant toutes ces années. Dieu vous récompense maintenant en rendant vos derniers jours heureux. Vous pouvez marcher maintenant, M. le Congressiste. Le Seigneur Jésus-Christ vous a guéri.»

M. Upshaw ne savait pas trop quoi faire. Il dit : «Gloire à Dieu. Mon fils, si Jésus-Christ me laisse marcher sans mes béquilles, je passerai le reste de mes jours à Le glorifier.»

«M. le Congressiste...» Bill fit une pause et tituba. Il pouvait sentir ses forces le quitter rapidement. Ern Baxter et Leroy Kopp le soutinrent et commencèrent à le guider vers la sortie. Bill murmura : «M. le Congressiste, dans le Nom de Jésus-Christ, levez-vous sur vos pieds et marchez. Dieu vous a guéri. C’est un “Ainsi dit le Seigneur”!»

Le Pasteur Leroy Kopp retourna au micro et dit : «Frère Branham dit que M. le Congressiste

est guéri!»

Willie Upshaw sentit son cœur bondir dans sa poitrine. Il se dit en lui-même : «Frère Branham connaît la pensée de Dieu, alors je dois faire un pas de foi et accepter Jésus-Christ comme mon Guérisseur.»

Il sentit quelque chose de froid lui traverser le corps. Donnant un coup de pied sur ses béquilles, il se leva et fit un pas dans l’allée. Les nerfs de ses jambes, qui avaient été morts pendant de longues années, se mirent à picoter de vie. Ses muscles rabougris se remplirent de sang. Miraculeusement, ses jambes le supportèrent. Il fit un autre pas, puis un autre et un autre. Ça y était! Il marchait sans aucune aide!

Pendant que les auditeurs louaient Dieu avec exubérance, Willie Upshaw descendit l’allée jusqu’à l’avant et serra la main d’un Leroy Kopp plutôt étonné. Puis, se tenant là où tous pouvaient le voir, Willie Upshaw se pencha et alla toucher à ses orteils.[7]


 



[1] Actes 12

[2] Actes 27

[3] Apocalypse 22:16

[4] Apocalypse 19:10

[5] Marc 5:35, Actes 9:36-42

[6] Jean 4:6-19

[7] Le miracle que William Upshaw a expérimenté fut permanent. Il a marché normalement depuis cette soirée en février 1951 jusqu’à son décès le 21 novembre 1952 à l’âge de 86 ans.



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